Présentation de la mission archéologique française aux Emirats arabes unis
La coopération archéologique franco-émirienne
La Mission archéologique française aux Emirats arabes unis (FAMUAE) est encadrée par la coopération franco-émirienne.
Aujourd’hui, elle comprend :
la fouille de sites néolithiques à Umm al-Quwain (dont Mme Sophie Méry, Directeur de recherche au CNRS, est responsable),
et celle de sites de l’âge du Fer et plus récemment du Bronze récent à Masafi dans l’Emirat de Fujairah (que dirige Mr Julien Charbonnier, chercheur chez ARCHAÏOS).
A l’invitation des autorités émiriennes, la Mission FAMUAE effectue aussi des sondages et des prospections géo-archéologiques.
Les travaux de terrain et de post-fouille sont financés par la Commission des fouilles du Ministère des affaires étrangères, l’Institut français à Abou Dhabi, le Centre d’Archéologie d’Umm al-Quwain, le Département des Antiquités et des Musées de Fujairah, l’ANR NeoArabia (coordonnée par Jean-François Berger, Directeur de recherche au CNRS) et l’ANR Oasiwat (coordonnée par Louise Purdue, Chargée de recherche au CNRS).
Exposition archéologique en 2017-2018
La coopération archéologique franco-émirienne bénéficie de la remarquable volonté d’ouverture des autorités émiriennes. Elle a largement contribué ces 40 dernières années à faire émerger des cultures et des sociétés pratiquement inconnues, à construire l’histoire du pays, à faire progresser les connaissances et à les transmettre. Les musées émiriens ont été enrichis grâce à cette coopération.
Dans ce contexte, les actions de valorisation de l’Institut français d’Abou Dhabi et de la Mission FAMUAE se sont concrétisées par une exposition au Musée archéologique de l’Émirat de Sharjah, du 18 Octobre 2017 au 31 Janvier 2018.
Cette exposition, organisée avec les autorités des émirats d’Abou Dhabi, de Sharjah, d’Umm al-Quwain, de Fujairah et de Ra’s al-Khaimah, a été l’occasion, pour la première fois, de présenter au public les découvertes faites depuis 1977 sur les onze sites principaux fouillés par les Français en partenariat avec les autorités des différents émirats concernés.
Une centaine de pièces archéologiques datées du Néolithique à la période islamique a été exposée, accompagnées de photos grand-format, d’une frise chronologique et de panneaux explicatifs. Un catalogue trilingue illustré a été produit.
Fouilles et prospections franco-émiriennes à Umm al-Quwain depuis 2017
Ces dernières années, plusieurs objectifs ont été menés à bien dans l’Émirat d’Umm al-Quwain :
Compléter la carte archéologique des occupations humaines de l’Holocène (ancien et récent), en milieu côtier et insulaire, mais aussi fluviatile (oueds).
Caractériser, au moyen de sondages et de fouilles, le Néolithique local.
Établir les liens existant au Néolithique entre Umm al-Quwain, les émirats proches et les pays limitrophes du Golfe persique et du NO de l’Océan Indien.
Menées en partenariat avec l’Université d’Oxford Brooke (Professeur Adrian G. Parker), des recherches géoarchéologiques et paléoenvironnementales sont centrées sur l’analyse de l’évolution du climat entre les VIème et IVème millénaires, du Néolithique au début de l’âge du Bronze.
Une centaine de sites a été découverte depuis 2011, témoignant d’occupations humaines de la période Fasad (derniers chasseurs-cueilleurs, Xème-VIIIème millénaires) à la période islamique incluse. Une vingtaine de sites date du Néolithique.
L’habitat néolithique de Umm al-Quwain UAQ2 a fait l’objet d’une nouvelle campagne de fouille en 2017. Ce vaste habitat côtier a livré une stratigraphie longue, couvrant au moins le dernier tiers du VIème millénaire et le IVe millénaire av. n.è. La nécropole associée date du VIe millénaire. L’habitat de UAQ36 a livré des niveaux datés du Vème millénaire en 2018 et 2019. Le site de UAQ38, fouillé en 2019, a livré des niveaux du VIe millénaire.
La culture matérielle datée du VIe millénaire est particulièrement riche, avec une industrie lithique d’excellente facture comportant des pointes de flèche d’une grande finesse et des éléments de parures diversifiées comportant notamment des coquillages perforés, des perles en pierre tendres et dures, des pendants en coquillages. Il a pu être mis en évidence que les habitants d’Umm al Quwain UAQ2 exploitaient une grande partie de l’année les ressources abondantes de la lagune et de la mangrove près du site.
Si le climat était plus humide que l’actuel au VIe millénaire, favorisant le développement des communautés humaines, il devint de plus en plus aride ensuite. En lien probable avec ce contexte, les niveaux archéologiques du Ve millénaire (UAQ2, UAQ38) et du début du IVe millénaire (UAQ2) témoignent de changements importants, avec des occupations humaines moins intenses et plus brèves des sites côtiers, et une culture matérielle à la fois moins abondante et moins variée.
Dès le VIe millénaire, l’analyse de la culture matérielle (poterie, ornements, outillages divers) montre que les échanges étaient nombreux avec les populations de la rive arabe du Golfe et du Sultanat d’Oman.
Fouilles franco-émiriennes à Masafi, Emirat de Fujairah
L’opération Masafi de la Mission Archéologique Française aux E.A.U. s’attache depuis 2007 à étudier à étudier l’organisation territoriale d’une communauté de montagne au cours de la protohistoire et à en préciser l’évolution. Depuis 2017, elle est axée sur le IIe millénaire av. n.-è. (âge du Bronze moyen et récent).
Documenter et étudier cette période est crucial car elle demeure peu connue alors même qu’elle voit ou conditionne un grand nombre de transformations socio-économiques menant des premières sociétés villageoises de l’âge du Bronze ancien aux grands établissements de l’âge du Fer reliés par des réseaux caravaniers.
Les prospections menées par la MAFEAU ont notamment permis la découverte d’un site majeur de l’âge du Bronze récent (1600-1200 av. n.è.) : Masafi-5. Les travaux récents, et particulièrement l’étude de la céramique, suggèrent que ce site date de la transition entre l’âge du Bronze et le Fer, une phase jusqu’à présent très mal connue. Plus globalement, ces recherches ont permis de réécrire la chronologie de la seconde moitié du IIe millénaire av. n.è. en Arabie du sud-est et ont apporté des informations précieuses sur les modes de vie.
De nombreuses études et analyses (archéobotaniques, archéozoologiques, malacologiques, paléométallurgiques et chimiques) sont en cours en laboratoire pour approfondir notre connaissance du site.
Parallèlement, une étude paléo-environnementale et géoarchéologique pionnière portant sur la palmeraie et visant à comprendre ses grandes phases de développement a été conduite en partenariat avec l’ANR Oasiwat (coordonnée par Louise Purdue). Grâce à ces travaux, Masafi est aujourd’hui l’oasis d’Arabie orientale pour laquelle nous avons le plus de données factuelles. Il a ainsi été possible de retracer les grandes étapes de l’aménagement de l’oasis et de les corréler aux évolutions environnementales et socio-économiques.
Au cours du Bronze récent, l’occupation semble limitée à un seul site d’habitat, à vocation agro-pastorale mais sur lequel sont aussi attestées des activités artisanales (Masafi-5). La mise au jour d’un puits daté de cette période montre que l’oasis se développe déjà. L’âge du Fer correspond à l’apogée du site. Cette période est marquée par un accroissement du nombre de sites et leur spécialisation fonctionnelle : l’un d’entre eux est dévolu à l’habitat (Masafi-2), un autre aux activités cultuelles (Masafi-3) et un dernier accueille un bâtiment à caractère collectif (Masafi-1). La palmeraie est fortement remaniée, et à plusieurs reprises, au cours de cette période et les techniques hydrauliques se diversifient. L’activité semble limitée dans l’oasis dans les siècles suivant. Les travaux de la MAFEAU témoignent d’une nouvelle phase de forte activité après le 17e siècle de notre ère, se traduisant par la construction d’un fort et de nouveaux villages, le remaniement des terrasses cultivées et la construction de nouveaux ouvrages hydrauliques.